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4 déc. 2010

Moonlight Sonata - n°9

-  Bon, qu'est-ce qu'on fait maintenant ? demanda Emma, alors qu'ils étaient assis au bar, après avoir beaucoup dansé.
-  Allons nous promener, si vous voulez, proposa-t-il en tendant un billet au barman.
-  Très bonne idée...

Une fois dans la rue, Alex lui offrit sa veste, qu'elle refusa. « C'est très gentil, mais je n'ai pas froid. Et puis il ne faudrait pas que vous tombiez malade à cause de moi. » Alex la remit donc, et regarda le ciel étoilé tandis qu'ils marchaient côte à côte. Il ne trouvait rien à dire, il voulait seulement savourer ce moment. Il paraît que les gens trouvent l'infini de la voute céleste angoissant, mais lui voyait juste dans ce millier, ce millions de petites tâches de lumière des amies, des repères qui seraient toujours là quoi qu'il arrive.

-  Où sont les pigeons la nuit ? s'interrogea Emma.
-  Ils doivent dormir, répondit-il.
-  Oui, je m'en doute. Mais où ?
-  Je ne sais pas... Dans des genres de nids je suppose.
-  Je détesterais être un pigeon. Vous avez déjà regardé un pigeon attentivement ? Ils ont l'air abrutis, c'est fou. Imaginez-vous : vous ne pouvez pas avancer un pied sans faire un mouvement de la tête. Comme des petites machines toutes laides. Et leurs yeux stupides. On dit que Dieu a enlevé ses pattes au serpent pour le punir ; je préfère ne pas imaginer ce que les pigeons ont fait...

Alex se contenta de rire, et de la tirer soudain par le bras alors qu'elle allait se cogner contre un arbre. Il fallait dire qu'elle ne marchait plus très droit. Elle bascula alors contre son épaule, sur laquelle elle se reposa quelques secondes, avant de se dégager, et d'aller parler à un homme qui fumait à la porte d'un club adjacent.

-  Oh mon dieu, monsieur, ça va ?! s'exclama-t-elle avec frayeur.
-  Oui, très bien, merci, répondit-il un peu froidement, perplexe.
-  Vous êtes sûr ? Mais vous avez une toute petite tête !

Alexei se retint de rire, et la tira par la taille, pour l'éloigner de cet homme qui semblait ne pas comprendre si l'on se moquait de lui ou s'il avait mal entendu ce qu'on lui avait dit.

-  Emma, arrêtez, vous allez nous attirer des problèmes... la gronda-t-il d'une voix rieuse.

Elle se mit à rire, et longeait les murs, qu'elle caressait de la main.

-  Je pourrais dormir chez vous ? Je n'ai pas envie de rentrer chez moi, murmura-t-elle. Mais ne vous inquiétez pas, je serais comme...eh bien, quelqu'un de très chaste. Une nonne, par exemple. Ce n'est pas un piège de petite intrigante, marmonna-t-elle alors qu'elle s'était arrêtée de marcher, et qu'elle parlait toute seule, le front contre le mur.
-  Oui bien sûr. Venez Emma.

Elle se remit à marcher, et tandis qu'ils passaient devant un autre club, elle se mit à défiler en cadence, les yeux fermés, et à danser, ce qui obligea Alexei à revenir sur ses pas pour la chercher. Elle voulait encore danser, et en tâchant d'échapper à la main qu'Alex tendait pour la saisir, elle se cogna contre un passant.

-  Ça suffit comme ça, vous allez-vous faire mal. Et puis moi je travaille demain, dit-il en la portant dans ses bras.
-  Comme c'est romantique, rit-elle. Mais je peux tout à fait marcher, vous savez.

Alex ne répondit rien. Il sentait la peau douce et fraîche d'Emma sous ses doigts, et son souffle chaud dans son cou.

-  Juan m'a portée comme ça une fois. Je m'en souviens. C'était quand je m'étais endormie dans son taxi, le premier soir. J'étais si fatiguée qu'il n'arrivait pas à me faire dire où je vivais. J'avais juste dit que j'allais en direction du quartier de l'opéra. C'était drôle, j'avais rêvé de lui dans mon sommeil.
-  Juan ?
-  Oui, Juan, mon amant. Ou mon amoureux, ou ce que vous voulez. J'aime bien le mot amant. Ça me fait penser à un aimant. Ou à des amandes, remarquez. Que des choses positives donc.
-  Donc c'est comme ça que vous l'avez rencontré ?
-  Oui, exactement comme ça. Après coup, il m'a dit qu'il était resté longtemps sans savoir quoi faire de moi. Il me regardait dormir, et c'est là qu'il serait tombé amoureux de moi. J'ai trouvé ça un peu bizarre, ce n'est pas comme si j'avais quelque chose de spécial quand je dors. Mais ça m'a tout de même fait plaisir.
-  Et qu'est-ce qu'il a fait de vous alors ?
-  Il m'a ramenée chez lui. Il avait peur que je l'accuse d'être un pervers, alors il m'a allongée sur son sofa, toute habillée. Je raconte ça parce que dans un film que j'ai vu, il se passe à peu près la même chose, mais je crois qu'il déshabille la fille pour la coucher.
-  Et après ?
-  Le lendemain, je me suis réveillée, j'ai fait semblant d'être un peu choquée, pour lui montrer que je n'étais pas du genre à m'échouer dans tous les taxis de la ville, et que je n'étais pas une fille qui couche. Et après je suis partie, mais j'ai fait exprès d'oublier mon passeport chez lui. Pour qu'il me retrouve. Parce que ça me chamboulait la façon qu'il avait de me regarder.
-  Ah, donc c'est une manie d'éparpiller vos affaires ?
-  Mais non. Pour vous, c'était complètement involontaire.

Ils étaient arrivés en bas de son immeuble, aussi il redéposa Emma sur le sol pour ouvrir la porte. Il lui laissa son lit, et se coucha sur le canapé. Il passa une nuit pleine de rêves plus étranges les uns que les autres, et quand il se réveilla, le lendemain matin, il découvrit sur la table de son salon une petite carte. « Merci pour tout, E. »

3 commentaires:

  1. Très joli, j'aime beaucoup les dialogues.
    Je pense que tu voulais dire "sentait" dans cette phrase:
    "Alex ne répondit rien. Il SEMBLAIT la peau douce et fraîche d'Emma sous ses doigts, et son souffle chaud dans son cou."

    et que tu as oublié le mot "amoureux" dans celle ci :
    "Il me regardait dormir, et c'est là qu'il serait tombé de moi."

    Aurélien Belaud

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  2. Evidemment ^^ (hinhin je me sens très bête). Merci pour le commentaire =) (on va dire que c'est une stratégie pour avoir des commentaires Oo et non que mon cerveau à des problèmes de relecture-passoire Oo)

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  3. great! as usual Elfrida ;)
    hâte de lire la suite
    ju

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